La réinsertion des détenus

Anaïs GRAND/École du journalisme Nice/oct 2019

Sortir de prison, mais toujours derrière les barreaux

Pas si simple de retrouver sa liberté après se l’être fait confisquer. À Nice, les associations, anciens détenus, et aumône de la Maison d’arrêt sont clairs : sortir de prison, c’est y garder un pied quand même. Jean-Paul Santinelli fait parti de l’association qui prend en charge tous les frais des anciens détenus. Besoins alimentaire, charges des loyers, frais médicaux… Tout y passe. « Ils ne peuvent pas sortir de prison s’ils n’ont pas de logement », alerte Jean-Paul Santinelli, qui attend depuis un an la création de 1 500 postes de conseillers en réinsertion, promis par Emmanuel Macron, dans le cadre du ‘‘Plan Prison’’.
Bénévole depuis 3 ans pour l’association Trait d’union Saint-Léonard, Jean-Paul Santinelli fait aussi partie de ceux qui aident les anciens détenus à se réinsérer. Créée depuis 9 ans, l’association est régulièrement sollicitée par des détenus. Recherche de logement, de travail… la dizaine de membres est là pour les aider. « Ce qui leur pose surtout problème est de retrouver un hébergement. Ils n’ont pas forcément les contacts, et le casier bloque parfois. Pourtant, c’est la première condition pour mettre un pied dehors », détaille-t-il. L’association en propose trois, tous mis à disposition par les propriétaires. Un dans le Vieux Nice, deux autres dans les quartiers Grosso et Pasteur. Mais pour y vivre, il y a des conditions. Les dossiers sont examinés pour sélectionner ceux qui ont le plus de chance de se réinsérer, et les contrats sont signés pour un an – sauf exception. Bilan ? Des résultats gratifiants : « Nous avons eu un jeune sous bracelet électronique qui est retourné en prison 5 jours après sa sortie, car il avait réussi à l’enlever. C’est le seul cas. S’il y en avait d’autres, on le saurait ». 94,7% des anciens détenus ont récidivé à cause de l’absence d’aide après leur libération, selon une étude réalisée par la faculté des sciences juridiques, économiques et sociales de Fès.
À Nice, Trait d’union Saint-Léonard, comme le Secours Populaire et quelques autres associations caritatives, sont les seules associations privées aidant à la réinsertion des sortants de prison. Mais Trait d’Union St Léonard est la seule à s’occuper spécifiquement de ce type de public. Des associations peuvent offrir des nuitées d’hôtel pour quelques jours en dépannage mais seule cette association prend en charge et héberge de façon durable les anciens détenus, que ce soient des hommes ou des femmes. Les aides publiques ? Il y en a peu. « Les personnes ne peuvent se tourner que vers le RSA ou Pôle Emploi, s’ils le peuvent » liste le retraité.
Le travail, deuxième priorité selon l’étude. 61,3% des récidivistes disent que les difficultés et les démarches administratives les dissuadent. « Les détenus ont peur d’en trouver un, ce qui est pourtant essentiel à avoir après leur sortie de prison. Et généralement, le casier judiciaire bloque directement l’accès », se désole Jean Lesparre, aumônier à la Maison d’arrêt de Nice.


Depuis 5 ans, il fait office de guide et de confident pour les détenus. Parfois, si tout se passe bien, les anciens prisonniers se réinsèrent en un an, « pour ceux qui ont de la chance », comme c’est le cas de Zitoun. Incarcéré pendant 10 mois à la Maison d’Arrêt de Nice, il a réussi à sortir. Mais sous conditions.
Bracelet électronique à la cheville, horaires précis de sortie, il retrouve petit à petit sa vie. « J’ai réussi à trouver un travail en tant que pizzaiolo. Si je n’en avais pas, ils ne m’auraient pas laissé mettre un pied dehors. Ça a été la condition pour que je sorte de la prison de Nice ». Cependant, il doit attendre encore 24 mois pour être totalement libre. Sauf si les tests toxicologiques se révèlent positifs. « J’ai rendez-vous tous les mois avec le service de probation et d’insertion pénitentiaire. S’ils voient que j’y arrive, ils vont me laisser tranquille ».
Mais il est des cas qui n’ont pas la même chance que lui. « Lorsqu’ils ne sont pas dans cette optique depuis le début, c’est plus dur. Pire encore, il y en a qui ne se réinsèrent jamais. Et c’est une dure réalité qu’il faut accepter », se désole l’aumônier.

Trois question à Jean Lesparre
Aumônier à la Maison d’Arrêt de Nice depuis 4 ans, il est l’œil et le confident des détenus, qui ont peur – pour beaucoup – de se réinsérer.


Quelles sont les modalités de sortie des détenus ? Les sorties sous condition peuvent être acceptées si le détenu a une promesse d’emploi, un logement, une situation favorable… Mais il peut y avoir des contrôles en fonction de la gravité de sa peine, comme porter un bracelet électronique. Par contre, quand on parle de ‘‘sortie sèche’’, le détenu est libéré d’office, sans condition, car il purgé sa peine, mais il n’a ni travail ni logement, et parfois pas de famille.


Que faudrait-il changer au système de réinsertion ? Faire quelque chose avec les familles. Pour ceux qui ressortent et qui ont de la chance d’en avoir, elles peuvent parfois ne pas se soucier de la situation de leur enfant sortant de prison. De plus, il faudrait instaurer des initiatives locales, davantage d’associations. Après, plus généralement, je suis très favorable à une justice dite ‘’restaurative’’. Plus de liberté, plus d’activité… Le tout pour une meilleure réinsertion. Mais attention, il faut l’adapter au type de population, et qu’elle soit acceptée par tous.


Y a-t-il des personnes qui ne se réinsèrent jamais ? Très clairement. Il faut être réaliste. Celles qui n’ont jamais travaillé de leur vie, dont le rythme de vie n’est pas du tout le même, ou qui n’ont pas de motivation ne s’en sortiront pas. D’autres qui ont toujours baigné dans le trafic. Pourquoi s’acharner à trouver un travail qui paie moins que les 5 000 euros qu’ils gagnaient

 


 

Grands Reportages TF1 du 15 octobre 2017 – La vie derrière les murs

« La vie derrière les murs »…

Un film écrit par Eric Lemasson. Réalisé par Eric Lemasson et Alexandre Gosselet. Images : Alexandre Gosselet et Eric Lemasson Montage : Alexandre Gosselet(Les productions du moment).

En France, il est rare qu’une équipe de télévision soit autorisée à filmer en prison des détenus à visage découvert. Après plusieurs mois de discussion, une équipe de Grands Reportages a filmé pendant six mois le quotidien derrière les murs de ceux que l’on nomme les « Longues peines », au sein du centre de détention de Muret, près de Toulouse. Cette immense prison accueille plus de 600 détenus, tous criminels… Une soixantaine sont condamnés à la réclusion à perpétuité.

voir la vidéo en cliquant sur le lien suivant

https://www.tf1.fr/tf1/grands-reportages


Sortir de prison : un défi ! Changer notre regard sur la prison – conférence à Evreux le 20 octobre

Annonces Infocatho
– Oct 14, 2017

L’association ETINCELLE, dans la suite de l’année de la Miséricorde, organise à l’Espace Nétreville à Evreux une conférence débat donnée par Monsieur Alain CUGNO le 20 octobre à 20h30.

philosophe et rédacteur en chef de la revue de la FARAPEJ (Fédération des Associations “Réfléxion ; Action ; Prison et Justice”). Cette association française, créée le 6 avril 1991, a pour but de fédérer des associations souhaitant contribuer à l’amélioration du fonctionnement de la justice et de la police et agir pour limiter les effets destructurants de la prison.
Pour télécharger le tract

Présentation de l’Association ETINCELLE

L’association ETINCELLE a été fondée à l’initiative de deux anciens aumôniers de prison : Sœur Yannique Fréhart et Père Jean-François Berjonneau.
Par la création de cette association, ils ont voulu apporter leur contribution à une situation souvent dramatique : la sortie de prison.
L’un et l’autre, sur un laps de temps qui couvre plusieurs dizaines d’années, ont été témoins de ces « sorties » où des personnes qui avaient purgé leur peine sortaient de prison sans relations, sans logement, sans emploi et se retrouvaient à la rue, dans un dénuement complet. Cette situation est souvent un tremplin pour la récidive !

En lien avec le Service pénitentiaire d’insertion et de probation, cette association a pour but d’accompagner et de soutenir ces personnes souvent jeunes dans leur projet de retrouver une juste place dans la société.

Elle s’est aussi fixé l’objectif d’informer et de sensibiliser l’opinion publique sur les exigences de la réinsertion et sur le changement de regard sur la prison que cela implique pour prévenir les risques de récidive.


Réinsertion : des prisons pas comme les autres

Cette semaine, gros plan sur la réhabilitation et la réinsertion des détenus français. Nous allons à la rencontre des détenus et gardiens de la prison de la Santé à Paris, de Nanterre ainsi qu’à la Maison Centrale de Saint-Martin-de-Ré. Nous verrons avec eux les expérimentations réalisées par l’administration pénitentiaire en termes de réinsertion et notamment les effets du sport sur leur quotidien et leur retour à la vie civile.

Par Joanna COCKERELL , Stéphanie CHEVAL , Achren VERDIAN , Sonia BARITELLO , Jeanne LAVENANT



La désistance : « the road from crime »

road-from-crime

Désistant – film / français sous-titré

Quels enseignements peut-on tirer des anciens prisonniers qui ont réussi à renoncer au crime ou qui ont « retrouvé le droit chemin » ?
Published on 12 Jul 2012
 

Description

Avec 60% des prisonniers libérés qui récidivent au cours des deux ans qui suivent leur libération, les portes de prison semblent souvent être des portes à tambour. Au cours du siècle dernier, les prisons et les services de probation ont presque tout essayé pour tenter de réhabiliter les criminels, mais les résultats étant immanquablement décevants, nombreux sont ceux qui en concluent que rien ne marche. Mais ces dix dernières années, un groupe de criminologues s’est penché sur ce qui aurait dû être une source évidente d’inspiration en matière de réinsertion des prisonniers: les 40 pour cent restant!

Dans ce documentaire captivant et tout à fait à propos, Allan Weaver, ancien prisonnier écossais reconverti en conseiller de probation (auteur du livre So You Think You Know Me?), pose une question simple: quels enseignements peut-on tirer des anciens prisonniers qui ont réussi à renoncer au crime ou qui ont retrouvé le droit chemin?

Prenant comme point de départ les rues de sa ville natale et à la prison Barlinnie de Glasgow, où tout a commencé pour lui, Allan tente de comprendre comment des individus tels que lui-même se retrouvent piégés dans des cycles de crime et d’incarcération, et comment ils brisent ces cycles pour se forger de nouvelles vies. Cette exploration l’amène à rencontrer d’anciens prisonniers, des groupes d’anciens prisonniers activistes et des responsables de services de probation du Royaume-Uni, ainsi que des experts en criminologie basés à Londres et à Washington.

Il découvre que le processus de justice pénale a effectivement tendance à entraîner un taux de récidive du fait qu’il catalogue et stigmatise les anciens prisonniers. En effet, si les anciens prisonniers qui disent avoir été réinsérés par le système de justice pénale se font rares, ils sont en revanche nombreux à accuser ce système de les avoir maintenus dans ces cycles de crime et d’incarcération.

Allan apprend que le changement réel repose plutôt sur un processus de découverte de soi et de soutien réciproque. Il découvre que la désistance du crime est un processus de changement intérieur, qui ne peut cependant se faire, la plupart du temps, qu’avec le soutien de l’extérieur. D’anciens prisonniers parlent en détail des individus remarquables qui ont cru en eux quand d’autres avaient perdu espoir et évoquent le fait d’avoir compris qu’ils avaient aussi quelque chose à offrir aux autres, et notamment, dans bien des cas, à leurs enfants. Pour eux, la désistance, c’est la prise de conscience que l’on est davantage que la somme de ses crimes et la redécouverte de son humanité, de son potentiel et de son moi réel.

La grande question, celle qui intéresse particulièrement Allan dans son travail de conseiller de probation, est la suivante: comment peut-on intégrer ces dynamiques souvent intangibles aux processus d’interventions pénales? La justice pénale peut-elle être améliorée si l’on cerne mieux les processus de changement efficaces impliqués dans la désistance du crime ? En quoi le système de justice pénale serait-il différent s’il était géré par des personnes comme Allan, qui ont elles-mêmes vécu ce changement?

Pour répondre à ces interrogations, Allan plonge dans un monde fascinant, où des groupes d’entraide d’anciens prisonniers et d’activistes défendent un nouveau modèle d’application de la justice pénale. A l’instar d’Allan, nombreux sont les anciens prisonniers qui ont trouvé un sens et un but à leur vie en aidant les autres à éviter de reproduire les mêmes erreurs. Il se pourrait également qu’ils aient les réponses pour résoudre le problème persistant de la récidive criminelle.

Ce film a été produit dans le cadre d’un projet visant à partager les connaissances que l’on a des raisons qui poussent certains à abandonner le crime et à en améliorer la compréhension. Pour en savoir plus sur le projet dans son ensemble et pour pouvoir commenter le film, visitez le blog Discovering Desistance. Nous avons également produit une synthèse qui vient compléter le film, intitulée How and why people stop offending (Comment et pourquoi on ne récidive pas).

Le projet est financé par l’Economic and Social Research Council et l’université George Mason. Le responsable de projet est Fergus McNeill (Scottish Centre for Crime and Justice Research, Université de Glasgow), le reste de l’équipe étant composé de Stephen Farrall (université de Sheffield), Claire Lightowler (Iriss) et Shadd Maruna (Institute of Criminology and Criminal Justice, université Queen’s de Belfast).

Pour visionner la vidéo, cliquer sur le lien  :  https://vimeo.com/45838043


Opération « Un livre pour la prison » : le Barreau a fait don, hier, d’un millier d’ouvrages à la maison d’arrêt de Nice.

Cliquer sur le lien ci-dessous pour lire l’article :

remise de livres à la MA 06 06 16


 

Prisons: « La machine pénale explose »

Propos recueillis par François Koch, publié le "Les Français veulent de nouvelles places de prison, mais loin de chez eux", note Stéphane Jacquot.

« Les Français veulent de nouvelles places de prison, mais loin de chez eux », note Stéphane Jacquot.

REUTERS/Charles Platiau

Rien ne prédestinait Dominique Raimbourg, député PS, et Stéphane Jacquot, ancien secrétaire national de l’UMP, à rédiger ensemble un livre sur les limites de la prison pour freiner la délinquance. Avec un pragmatisme qui bouscule les idées reçues. Points de vue croisés.

Il y a quatre ans, Dominique Raimbourg voyait à l’UMP des adeptes du « tout carcéral » inefficace et Stéphane Jacquot taxait les socialistes de laxistes « videurs de prisons ». Pourquoi avoir écrit un livre ensemble?

Dominique Raimbourg : J’ai accepté la proposition de Stéphane Jacquot, car il ne partageait pas le discours tout sécuritaire, celui qui fait passer la prison pour un lieu « magique » qui résoudrait définitivement la question de la délinquance. De mon côté, j’ai cessé de croire que la solution passe uniquement par des droits nouveaux accordés aux détenus. Nous étions à des années-lumière l’un de l’autre et nous nous sommes retrouvés autour d’une approche rationnelle.

 

Stéphane Jacquot: Je demeure fidèle à ma famille politique, la droite, même si mes idées ont évolué depuis quatre ans. Avec Nicolas Sarkozy, nous avons connu, hélas, un quinquennat hypersécuritaire. Le « tout carcéral » est une erreur, le taux élevé de récidives en est la preuve. C’est un constat citoyen, non une option idéologique. Nous pouvons signer ensemble ce livre, car nous avons laissé de côté nos appartenances politiques.

>> Notre dossier sur les prisons

 

Comment vous êtes-vous accordés sur le nombre de places de prison, sujet hautement polémique?

D. R. : Il y a actuellement 66200 détenus. De manière pragmatique, nous optons pour 66000 places de prison. Cela implique un double objectif: construire 8000 places et réduire un peu le nombre de détenus, car le taux d’occupation ne peut pas être de 100%, ne serait-ce qu’en raison des cellules en travaux. Il y a aujourd’hui trop de prisonniers. Il faudrait avoir la volonté politique de ne pas dépasser 62000 détenus et décider qu’au-delà les condamnés doivent subir d’autres peines.

Faut-il alors instaurer un numerus clausus?

D. R. : Oui. Pas en limitant l’entrée en prison, mais en accélérant la sortie, avec des libérations sous contrainte pour des condamnés en fin de peine. Ainsi, il n’y aurait pas plus de détenus que de places occupées (alors qu’aujourd’hui l’excédent se situe à 20%). Pour y parvenir, la loi que la garde des Sceaux a fait adopter en août 2014 sera précieuse.

Pourquoi l’ancien secrétaire national de l’UMP soutient-il la réforme pénale de Christiane Taubira?

S. J. : J’approuve cette loi, comme certains parlementaires de droite, certes minoritaires, car elle met l’accent sur la préparation à la sortie de détention en faisant de la réinsertion une priorité. C’est la seule voie possible pour faire baisser la récidive. La réforme Taubira a le mérite de proposer des alternatives à l’incarcération. L’enfermement doit rester une peine ultime réservée aux criminels qui représentent un réel danger pour notre société.

D. R. : La loi Taubira a le mérite de s’intéresser à ce que deviennent les détenus après la prison, alors que 80% d’entre eux sortent toujours sans suivi. Il s’agit d’instaurer un contrôle intense, de qualité et visible avec le concours de la police et de la gendarmerie – une avancée essentielle. Ainsi, j’espère que, progressivement, les Français admettront que les peines en dehors des murs, au sein de la société, sont d’authentiques sanctions.

S.J.: Je souhaite que les sortants de prison puissent bénéficier d’un tutorat. Cette mission pourrait être confiée aux visiteurs de prison, qui continueraient leur accompagnement « hors les murs ». Cela contribuerait à éviter la récidive.

Dominique Raimbourg et Stéphane Jacquot jugent que la réinsertion des détenus garantit une moindre récidive.

Il y a trois ans, la garde des Sceaux taxait les prisons d' »écoles du crime ». Pourquoi a-t-elle échoué, ou pire, renoncé, à les réformer en profondeur?

D. R. : La loi Taubira s’attaque à la récidive, mais elle n’a que quatorze mois d’ancienneté. J’ai une double déception : j’aurai aimé que cette loi soit votée plus tôt dans le quinquennat et qu’elle entre en application avec moins de lenteur.

Pourquoi les Français perçoivent-ils les prisons comme des « établissements quatre étoiles », mais aussi comme des « fabriques de fauves »?

D. R. : Le problème, c’est la gestion du « Mal ». En apparence, les prisons fonctionnent parfaitement bien, puisqu’on enferme le Mal rapidement. Alors qu’il faut beaucoup plus de temps pour trouver un hébergement en foyer ou obtenir une admission en hôpital psychiatrique. Du coup, la prison est perçue comme efficace, alors que la chaîne pénale entière dysfonctionne: nous n’avons pas besoin de peines plus sévères, mais de peines appliquées beaucoup moins lentement. La rapidité de la sanction éviterait que tant de délinquants se disent: « Je réussirai bien à passer au travers. »

S. J. : Dans notre pays, le regard porté sur le délinquant demeure très négatif. Pour la plupart de nos concitoyens, celui qui a fauté recommencera! Nous manquons d’une culture de la réhabilitation – qui fonctionne ailleurs, comme au Canada. Là-bas, la réinsertion de celui qui a violé la loi est l’affaire de tous. En France, une fois sa peine accomplie, un ancien détenu traîne son passé, ce qui nuit beaucoup à ses efforts de réinsertion. De la même façon, les Français veulent de nouvelles places de prison, mais loin de chez eux.

Pourquoi l’institution pénitentiaire demeure-t-elle en crise, dans l’indifférence des gouvernements?

D. R. : La crise est globale. Car le budget de la justice augmente, mais sans commune mesure avec l’accroissement de la charge de travail. En quelques décennies, la proportion de dossiers qui reçoivent une réponse pénale est passé de 50 à 90%, le tout à effectifs quasiment constants. Par ailleurs, on n’a pas donné des moyens suffisants à l’exécution et à l’aménagement des peines. Du coup, la machine explose de toutes parts. Or, la seule institution qui ne peut pas « refuser le client », en différant l’incarcération, c’est la Pénitentiaire. Donc, on remplit, on remplit, et on remplit. C’est la conséquence de la crise de la chaîne police-justice-pénitentiaire, où chacun des acteurs a le sentiment désespérant de vider la mer avec une cuillère… et que c’est la faute de l’autre.

S. J.: Il faudrait, pour cette administration dotée d’un budget de 3 milliards d’euros, un secrétariat d’État à la Condition pénitentiaire, comme c’était le cas entre 1974 et 1976. Cela permettrait d’améliorer l’image de la prison auprès des Français, de donner du poids aux projets de réformes destinées à rendre plus utile l’exécution des peines, et aussi d’apporter une reconnaissance statutaire et indiciaire aux personnels pénitentiaires, qui en manquent cruellement.

Afin que les prisons deviennent efficaces, ne faut-il pas avant tout supprimer la surpopulation carcérale (1 détenu sur 5 en surnombre) ?

D. R.: Il existait un moyen à la fois efficace, brutal et maladroit: la grâce présidentielle. Nicolas Sarkozy a eu raison de la supprimer… mais il aurait fallu mettre en place un autre système.

Vous écrivez que certains condamnés ne devraient pas être incarcérés? Lesquels?

D. R. : Tous les malades mentaux, évalués entre 10 à 30% des détenus ! Du trouble caractériel aux véritables délires. Il y a aussi les courtes peines, les condamnés à moins de six mois de prison (dont 98% sortent sans aucun suivi). Mais il ne faut surtout pas voter une loi couperet interdisant les condamnations de six mois et moins, car elle provoquerait des condamnations à six mois et un jour. Face à un multirécidiviste très désocialisé dont le juge ne sait que faire, il opte souvent pour une courte peine de prison. C’est pour ces profils que le Parlement a adopté en 2014 la contrainte pénale, autrement dit un contrôle social très serré, adapté à une population difficile qui passe à l’acte de manière chronique.

S. J.: En 2009, la majorité UMP avait voté une loi demandant que l’on recherche des aménagements de peine pour les condamnations de moins de deux ans de prison – sans que ce soit appliqué. Il faudrait maintenant réellement mettre en œuvre ce système pour les peines de moins d’un an. Développons enfin les travaux d’intérêt général (TIG), avec un partenariat entre le ministère de la Justice et les collectivités territoriales, mais aussi les grandes entreprises.

D. R.: Si, dans deux ou trois ans, il y a toujours aussi peu de TIG dans les municipalités ou les grandes entreprises publiques, je suis favorable à un quota imposé par la loi.

Pourquoi, en prison, l’oisiveté est-elle la règle, et la formation et le travail l’exception?

S. J. : Le nombre d’entreprises acceptant de créer des ateliers en prison est beaucoup trop faible. Et les détenus travaillent sans cadre légal. Donc je souhaite qu’ils bénéficient d’un contrat de travail de droit administratif, avec une rémunération horaire, alors qu’aujourd’hui le paiement est à la tâche. Car cet emploi s’exerce dans le cadre d’un service public. Je propose aussi la création d’une agence nationale du travail des personnes placées sous main de justice, pour l’encadrement du travail en détention et le développement des TIG.

D. R.: Avec un salaire minimum, la rentabilité des détenus serait trop faible pour convaincre des entreprises de s’installer en prison. Je suis donc plutôt favorable à une rémunération mixte : au temps passé et à la tâche. En Italie, les détenus bénéficient désormais de contrats de travail de droit commun: résultat, il n’y a plus de travail en prison.

Le modèle, c’est une prison de 800 places, avec 1000 détenus. Ne faut-il pas revenir à des établissements de 30 à 150 places en centre-ville?

D. R.: Oui, les conditions de détention pour les détenus et de travail pour les surveillants seraient meilleures. Mais plus l’établissement est proche du centre- ville, et plus il est de petite taille, plus c’est coûteux à construire.

Pourquoi notre pays est-il bloqué sur la question des prisons, alors que nos voisins allemands, néerlandais ou scandinaves se réforment?

D. R.: Parce qu’en France nous ne parvenons pas à gérer la question du Mal de manière pragmatique. L’opinion est influencée par des faits divers horribles sur lesquels les télévisions braquent de plus en plus leurs projecteurs, cédant à une « hystérisation » autour du crime. Cela pervertit notre démocratie. Tout tourne autour de la campagne présidentielle réduite à une compétition populiste où les questions de justice et de sécurité sont traitées avec une pauvreté affligeante. Dans ce cadre, aucun candidat n’ose avancer des propositions de réforme constructives sur la lutte contre la récidive à l’intérieur et en dehors des prisons.

Stéphane Jacquot

1983 Naît à Pontoise (Val-d’Oise).

2004 Adhère à l’UMP.

2008 Entre au conseil municipal de Châtillon (Hauts-de-Seine).

2010 Fonde l’Association nationale de justice réparatrice.

De 2011 à 2014, secrétaire national de l’UMP chargé des prisons.

2015 Intègre l’équipe de campagne d’Alain Juppé.

 

Dominique Raimbourg

1950 Naît à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), fils de l’acteur Bourvil.

1976 Prête le serment d’avocat.

2007 Est élu député PS en Loire-Atlantique.

2012 Participe à la rédaction du programme de François Hollande et est élu vice-président de la Commission des lois.

2014 Rapporteur de la réforme pénale de Christiane Taubira.

Prison. Le choix de la raison, par Stéphane Jacquot et Dominique Raimbourg, préface de Robert Badinter. Ed.Economica, 108p., 19€.


En prison, passer par la case formation

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En prison, les places de formation sont chères. 1500 détenus postulent chaque année à Fleury-Mérogis, mais seuls 278 ont été admis cette année.

En prison, les places de formation sont chères. 1500 détenus postulent chaque année à Fleury-Mérogis, mais seuls 278 ont été admis cette année.

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A la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, quelques centaines de prisonniers préparent des diplômes pendant leur détention. A l’atelier, les journées filent plus vite que dans les cellules et les détenus préparent la vie hors les murs.

La salle ressemble à n’importe quel atelier de formation en électricité. Une dizaine d’hommes en bleu de travail, souvent jeunes, relient minutieusement des câbles à des compteurs. Chaque élève possède un établi à son nom. C’est jour d’examen blanc et un formateur les supervise de loin. Il faut sortir des lieux par la porte verrouillée et jeter un oeil à l’extérieur, depuis le couloir, pour prendre la mesure du décor atypique. Des vitres cassées laissent entrevoir une cour de promenade, que des détenus arpentent par groupe de deux ou trois. Au-dessus, un mur grisâtre couvert de « yoyos », ces ficelles que les prisonniers tendent entre les fenêtres pour se passer des objets. Les ateliers sont ceux de la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis, dans l’Essonne, le plus grand centre pénitentiaire d’Europe.

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Une dizaine de ces lieux sont installés le long des murs d’enceinte des bâtiments pour hommes. Y défilent les détenus qui mettent à profit leur détention pour préparer un diplôme. « Six heures par jour, tous les jours de la semaine sauf le mercredi où ils ont sport », égrène Thierry Pagès, formateur en électricité. Mécanicien, cariste, peintre… Les formations assurées par des organismes privés préparent à des titres professionnels de niveau IV ou V, équivalents du bac pro ou du CAP. Un grand nombre de détenus arrivent à Fleury-Mérogis sans qualification.

 

« Le juge en tient compte »

A l’atelier couture, Christian* écrase une manche de veste au fer à repasser. « J’ouvre la couture pour retirer de l’épaisseur », commente-t-il, crayon coincé derrière l’oreille. A quelques mètres de lui, des ciseaux de tailleurs pendent à des clous fixés sur un tableau. Leur empreinte peinte en rouge sert à vérifier qu’aucun détenu n’embarque un outil à la fin de la journée. Christian prépare l’examen de « fabriquant de vêtements sur mesure ». Beaucoup de détenus signent pour une formation dans l’espoir d’aménager leur peine. Christian ne s’en cache pas. « Si on se comporte bien dans les ateliers, le juge en tient compte. On est aussi mieux vu des surveillants. » Il devrait quitter Fleury en février au lieu d’avril, l’échéance initiale de sa condamnation.

Alexia Eychenne

 

Mais passer un diplôme adoucit aussi son quotidien. « Les journées filent deux fois plus vite », constate Christian. Comme tout stagiaire de la formation professionnelle en Ile-de-France, il est indemnisé 2,26 euros de l’heure. « En prison, ce n’est pas négligeable, explique-t-il. Ça sert à cantiner, à payer la télé ou le tabac des fumeurs, à faire sa ‘popote’. » Surtout, Christian prépare sa sortie. Avant son incarcération, il travaillait comme technicien de maintenance. « A 50 ans, je ne pourrai pas continuer longtemps. » Une fois dehors, il se voit bien poursuivre sa formation. « Je veux apprendre à dessiner les patrons. J’ai repéré deux cours en Ile-de-France. J’espère que Pôle emploi m’aidera. »

« Ils sortent avec un bon niveau »

 En prison, les places de formation sont chères. 1500 détenus postulent chaque année à Fleury-Mérogys, mais seuls 278 ont été admis cette année. En Ile-de-France, 1000 places sont ouvertes pour 14 000 détenus. Une « commission pluridisciplinaire unique » se réunit tous les quinze jours pour sélectionner les candidats. La direction de l’établissement siège au côté des services pénitentiaires d’insertion et de probation, parfois aussi des psychologues, des soignants, des aumôniers. Les critères de sélection? « Des détenus qui ne posent pas de problème de sécurité, avec des condamnations plutôt courtes et en fin de peine, pour que la formation accompagne la sortie, détaille Evelyne Le Cloirec, directrice du Centre des jeunes détenus (CJD). On essaye de repérer ceux qui ont le plus de chance d’aller au bout du processus. »
Alexia Eychenne

 

José Luis Da Silva enseigne les bases de la peinture. Aux murs de son atelier, un logo géant du PSG côtoie du marbre en trompe-l’oeil. Il ne se plaint pas de ses recrues. « Le fait qu’ils soient prisonniers ne change rien, juge-t-il. Dans le lot, il arrive que l’un d’eux se fasse ‘déclasser’ [sortir du dispositif, NDLR], mais en quatre ans, je n’ai essuyé qu’une insulte. Ils sortent avec un bon niveau. Quand j’étais chef de chantier, certains de mes gars n’étaient pas aussi doués que ceux que l’on forme ici. » Le personnel pénitentiaire applaudit aussi, pour une autre raison. « La formation apaise la détention. Un détenu formé, c’est un détenu plus calme que celui qui passe 20 heures en cellule », pointe Thierry Péré. Surveillant « orienteur », il reçoit les demandes de formation des prisonniers. Tous ne font pas la démarche, loin de là. « Certains gamins ne savent pas ce que c’est que de se lever le matin. Ils restent ancrés dans la délinquance. Les conseillers d’insertion travaillent à les ramener vers un projet, mais ce n’est pas simple. »

« Son patron est prêt à m’embaucher »

A Fleury-Mérogis, autour de 70% des stagiaires quittent leur formation diplôme en poche. Le taux de succès oscille entre 100% en nettoyage industriel et 50% chez les tailleurs. La preuve que « les jurys ne montrent aucune complaisance », souffle Thierry Péré. Une fois hors les murs, les anciens détenus retrouvent l’anonymat du droit commun. Impossible de savoir combien décrochent du travail, combien mettent à profit leurs nouvelles compétences. Le conseil régional d’Ile-de-France, qui gère la formation professionnelle en prison depuis janvier, souhaite que les chômeurs diplômés en prison accèdent en priorité aux formations « à l’extérieur » s’ils en font la demande. « Il faut sensibiliser Pôle emploi et les missions locales à ce public », estime Pierre-Marie Atger, sous-directeur à l’ingénierie de la formation professionnelle.

Quelques histoires heureuses remontent aux oreilles des formateurs. Patrice Gazziero prépare les détenus au nettoyage industriel. A chaque fin de session, il leur laisse son numéro. « Je connais du monde dans le métier, assure-t-il. Si quelqu’un de sérieux me demande un coup de main à la sortie, je le fais. » Il est fier de raconter qu’un ancien prisonnier qu’il avait épaulé vient d’être promu chef d’équipe. « Un qui s’en sort, estime-t-il, c’est déjà une grande victoire. » Joseph, 23 ans, sera peut-être de ceux-là. Il pose une installation électrique dans un des ateliers. « Si tout se passe bien », il quittera Fleury la veille de Noël, sans crainte. Au parloir, raconte-t-il, son frère lui a annoncé une bonne nouvelle: « Son patron est prêt à m’embaucher. »

* Les prénoms des personnes détenues ont été modifiés


La ferme de Moyembrie, en Picardie, accueille des détenus en fin de peine. Une seconde structure doit ouvrir dans l’Aude, avec toutes les questions que pose la duplication du modèle.

 

Après ce passage à la ferme, 60 % des détenus en fin de peine sortent avec un travail ou une formation.
 

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Après ce passage à la ferme, 60 % des détenus en fin de peine sortent avec un travail ou une formation. / Jean-Paul Guilloteau/Express/REA

Des champs et des forêts pour remplacer les murs aveugles et les barreaux de prison. Depuis sa création en 1990, la ferme de Moyembrie, située sur la commune picarde de Coucy-le-Château-Auffrique (Aisne), accueille chaque année une cinquantaine de détenus en fin de peine, pour faciliter leur réinsertion.

Les pensionnaires de cette ferme unique en son genre sont logés sur place ou, si leur peine est terminée, dans une maison-relais située à proximité. Ils bénéficient d’un contrat d’insertion de vingt heures par semaine, pour cultiver légumes, produire du fromage de chèvre ou des œufs. « Ce séjour les aide à reprendre contact avec leurs proches et à retrouver une activité professionnelle », explique Anne-Marie Pery, la présidente de l’association qui gère le lieu.

À la ferme, la vie est collective et l’ambiance se veut familiale. « Il existe de grosses structures dans le secteur de l’insertion par le travail. Mais pour réussir à surmonter ses peurs, à se confier, un ancien prisonnier doit avoir confiance », argumente Anne-Marie Pery.

La méthode semble porter ses fruits : environ 60 % des personnes accueillies à la ferme, qui fonctionne avec six salariés et une vingtaine de bénévoles réguliers, en sortent avec un travail ou une formation. Membre du mouvement Emmaüs depuis 2009, l’association réfléchit désormais à ouvrir d’autres antennes. Ce qui soulève bien des questions, car Moyembrie s’est développée de manière empirique, hors institution – et constitue donc un projet difficile à dupliquer.

Pour initier un nouveau projet, il faut d’abord réunir de nombreux acteurs autour d’une même table : les collectivités territoriales, les services du ministère du travail qui gèrent les structures d’insertion par le travail, les services pénitentiaires d’insertion et de probation (Spip) de la région, et surtout les juges d’application des peines, seuls à même de placer un détenu dans une structure ouverte.

Toutes ces conditions semblent réunies à Lespinassière, petite commune de l’Aude, où un ancien bénévole de l’association doit ouvrir une « petite sœur » de Moyembrie début 2017. « Le porteur de projet est très motivé, il connaît bien l’institution judiciaire et, élément indispensable, la commune l’a très bien accueilli, se réjouit Hector Hubert, employé à l’Avise qui conseille l’association. Mais il ne faut surtout pas chercher à faire un copier-coller de ce qui existe à Moyembrie. Chaque projet correspond à un territoire et à un fondateur. »

La nouvelle structure prévoit de cultiver des arbres fruitiers. À condition qu’elle trouve les financements pour rénover le lieu, propriété d’Emmaüs. Budget des travaux : entre un et deux millions d’euros.

Julien Duriez
 
 
 
 

 
 
10 septembre 2015

Prison : se réinsérer grâce à la médiation animale

Atelier éducation canine avec l’association handi’chiens

Depuis 2013, le centre pénitentiaire d’Alençon-Condé sur-Sarthe collabore avec l’association handichiens. Objectif : faire participer des personnes détenues à l’éducation de chiens pour les personnes handicapées pendant 6 mois grâce au soutien financier de la Fondation de France et la Fondation Adrienne et Pierre Sommer.

crédit photo :FondationdeFrance/T.Salva

Sophie Lasne travaille pour handi’chiens depuis 1992. Convaincue du bienfait des animaux sur les êtres humains, elle intervient au centre pénitentiaire d’Alençon-Condé-sur-Sarthe en tant que médiatrice animale.

Comment se déroule l’activité en détention ?

« Les séances de  médiation animale se déroulent de septembre à juin dans une salle de l’unité sanitaire du centre pénitentiaire. Dès leur arrivée en détention,  les chiens favorisent la communication et leur présence dans l’unité suscite de la curiosité et des échanges avec les professionnels de la santé, les surveillants et entre les personnes détenues.

Deux groupes de 4 personnes détenues, sélectionnées sur critères (comportement, activité dans leur parcours de réinsertion, gestion des émotions), apprennent à s’occuper de 4 labradors. Ces chiens entament leur dernier cycle d’éducation au centre Handi’chiens d’Alençon pour devenir des chiens d’assistance auprès de personnes en situation d’handicap.

Lors de ces séances, les personnes détenues participent à différentes activités avec leur chien. Par exemple, le toilettage permet d’établir un lien et favorise le contact avec l’animal. Je leur transmets également des notions de psychologie et d’éducation canine (travail sur les commandes, sur les intonations, observation du chien).

Les personnes détenues prennent conscience de leur responsabilité durant l’activité : devenir maitre d’un chien implique d’apprendre à le connaître, d’en être responsable, de s’en occuper et surtout d’assurer son bien-être. Je les sensibilise également sur le handicap qui est  la raison d’être de notre association ».

Sophie Lasne /FondationdeFrance/T.Salva Les chiens rentrent en détention : crédit photo: FondationdeFrance/T.Salva
Quel est l’effet sur les personnes détenues ?

« De nombreux bienfaits ! L’activité offre une parenthèse dans leur détention. Chaque semaine, elles sont présentes et ne ratent aucune séance.

Beaucoup de participants ont connu la violence dans leurs parcours de vie. La présence d’un chien les apaise car elle agit comme un médiateur : les chiens ne jugent pas et ils donnent de l’affection sans rien attendre en retour. A leur contact, les personnes détenues se sentent utiles, valorisées et se découvrent sous un autre jour.

Activité de toilettage crédit photo FondationdeFrance/T.Salva

Auparavant certains participants avaient des chiens mais n’avaient aucune notion d’éducation. Avec cette activité, ils prennent conscience de l’importance d’éduquer un animal avec de la douceur, de l’amour et du respect.

Participer à l’éducation de ces chiens lors des séances de médiation animale aide à leur parcours de réinsertion. Il s’agit surtout d’une activité valorisante : les personnes détenues ont toutes envie de bien faire pour pouvoir aider une personne handicapée.

Cette activité leur donne une meilleure estime de soi et leur permet de redonner un sens à leur vie avec des perspectives d’avenir. Certains souhaitent prendre un chien à leur sortie et mettre en application ce qu’elles ont appris ».

Quels sont vos projets pour cette activité ?

« Je souhaite continuer cette activité en détention que je mène également au centre pénitentiaire pour  femmes de Rennes. L’activité est d’ailleurs reconduite et dès la rentrée 2015 de nouvelles personnes détenues pourront en bénéficier et profiter de la présence des chiens.

J’aimerais également aller plus loin en permettant au chien de séjourner avec une personne détenue en détention pour sa pré-éducation avant d’être confié à un centre d’éducation et ensuite remis à une personne en situation de handicap.

Je pense qu’il serait également intéressant de proposer une telle activité avec un public de mineurs. Le chien aurait alors toute sa place avec des jeunes détenus souffrant souvent de carences affectives« .

crédit photo :FondationdeFrance/T.Salva

>> Découvrir l’association Handi’chiens , la Fondation de France et la Fondation Adrienne et Pierre Sommer.
>> Pour voir les partenaires associatifs de l’administration pénitentiaire, cliquez ici
>> Lire aussi les articles sur «l’équithérapie en milieu carcéral» et « la médiation animale en détention ».